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7/07/21

Le droit à la protection des données personnelles n’est pas un droit absolu face à la liberté d’information

Par un jugement rendu le 30 juin 2021 par sa 17ème chambre civile, le Tribunal Judiciaire de Paris fait primer le droit à la liberté d’information sur le droit à la protection des données personnelles.

En l’espèce, un ancien président d’un club de football des Hauts-de-Seine a assigné la SAS 20 Minutes France devant le Tribunal Judiciaire de Paris au sujet d’un article publié par le journal sur son site Internet le 15 juin 2009 intitulé « Il détournait de l’argent pour un club ».

Dans cet article, le journal relatait la condamnation de l’ancien président du club sportif à la condamnation par le tribunal correctionnel de Nanterre à deux ans de prison avec sursis et 20 000 euros d’amende pour complicité, recel d’abus de confiance et abus de biens sociaux.

Le requérant a assigné le quotidien au nom du droit à la protection de ses données personnelles demandant l’anonymisation de l’article litigieux ainsi que la désindexation de celui-ci des moteurs de recherche ; le journal se défendant au nom du droit à l’information et à la liberté d’expression.

Le droit à l’oubli et le droit d’opposition

Le demandeur s’est prévalu des articles 17 et 21 du Règlement Général sur la Protection des Données  (UE) n°2016/679 du 27 avril 2016 et des articles 51 et 56 de la Loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978 sur le droit à l’effacement des données personnelles et le droit à l’opposition du traitement de ses données.

L’article 17 du Règlement Européen sur la Protection des Données consacre le « droit à l’oubli » dégagé antérieurement par la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne dans l’arrêt Google Spain SL c/ Costeja en ces termes : « La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement l’effacement, dans les meilleurs délais, de données à caractère personnel la concernant et le responsable du traitement a l’obligation d’effacer ces données à caractère personnel dans les meilleurs délais ».

Toutefois, le paragraphe 3 de cet article prévoit une liste d’exceptions à ce droit notamment lorsque le traitement est nécessaire « à l’exercice du droit à la liberté d’expression et d’information ». Le considérant 65 du Règlement ajoute que « la conservation ultérieure des données à caractère personnel devrait être licite lorsqu’elle est nécessaire à l’exercice du droit à la liberté d’expression et d’information ».

En ce sens, le Règlement Général sur la Protection des Données consacre la primauté du droit à la liberté d’expression et d’information sur le droit à l’oubli et au déréférencement.

L’article 21 du Règlement Général sur la Protection des Données consacre le droit à l’opposition du traitement de ses données à caractère personnel en ces termes : « La personne concernée a le droit de s’opposer à tout moment, pour des raisons tenant à sa situation particulière, à un traitement des données à caractère personnel la concernant ».

Il est toutefois précisé que « Le responsable du traitement ne traite plus les données à caractère personnel, à moins qu’il ne démontre qu’il existe des motifs légitimes et impérieux pour le traitement qui prévalent sur les intérêts et les droits et libertés de la personne concernée ».

Sur ces requêtes, le Tribunal Judiciaire a conclu au rejet de la demande du requérant conformément aux dispositions du Règlement au motif que « Le droit à la protection des données personnelles ne peut en effet être interprété comme un droit à faire disparaître à première demande des contenus médiatiques publiés sur internet, indépendamment d’un abus de la liberté d’expression et des règles de procédure destinées à protéger cette liberté fondamentale, dans la mesure où ils constituent un vivier d’informations à disposition des internautes devant pouvoir faire des recherches y compris sur des évènements passés, la presse contribuant à la mission de formation de l’opinion, relevant de son rôle dans une société démocratique, ni comme un droit à anonymiser les articles jusqu’à les priver de pertinence et de sens, la presse étant, comme le relève la société défenderesse, truffée de données personnelles », d’autant plus qu’elle ajoute que l’article traitait d’un « sujet d’intérêt général relatif à la condamnation pénale d’une personnalité officielle ayant présidé un club sportif notoire, s’inscrivant dans le sujet récurrent des relations entre le sport et l’argent ».

Le Tribunal Judiciaire a également rejeté la demande de désindexation de l’article litigieux des moteurs de recherche au simple motif qu’aucun moteur de recherche n’étant mis en cause, la SAS 20 Minutes France ne disposait pas de moyens concrets pour procéder à cette opération.

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Avocats concernés :